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Hésitations malgré la gravité de la situation. Fermeture (tardive) des portes de la ville

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La situation était déjà très grave. Le 10 juillet, Eissalène, le jeune malade de la place de Lenche expirait : la maladie avait donc gagné le sud de la vieille ville. Mr Moustier, échevin, fit aussitôt évacuer et murer la maison. Le 11 juillet, un évènement semblable se reproduisait. A partir de ce jour, la population se montra très inquiète mais chacun cherchait encore à se rassurer en spéculant sur les possibles conséquences d’une mauvaise alimentation et sur l’extinction probable et prochaine de la « peste » en raison d’une accalmie de l’épidémie.

 

Cependant, les autorités de la ville furent obligées d’aviser le Parlement de Provence, le Conseil de la Marine et l’Intendant de justice et du commerce de la situation marseillaise. Elles firent aussi rechercher en ville les effets personnels des « pestiférés », enfermer aux Infirmeries tous ceux qui avaient communiqué avec eux, et fermer hermétiquement les portes de la ville. Rappelons que la ville moderne, agrandie en 1666, était ceinte d’une muraille de protection hérissée de part en part de tours de guet. Neuf portes, ordinairement fermées la nuit, permettaient d’y entrer et d’en sortir. Le Père Paul Giraud, fervent partisan de mesures de restrictions de « communication » entre les personnes pour enrayer les progrès de la Contagion, observe que la mesure venait trop tard.

 

Voici ce qu’écrit Pichatty :

 

« Dès le moment on envoie des gardes à la porte de cette maison pour empêcher que personne n’en sorte.

« Le lendemain 10 juillet ce malade meurt & une sienne sœur se trouve malade ; on redouble la garde de la maison, et s’agissant d’enlever l’un et l’autre ; pour le faire tranquillement sans donner l’allarme au public, on attend la nuit, et sur les 11 heures Mr Moustier autre premier échevin s’y rend sans bruit, fait venir des portefaix des Infirmeries, les encourage à monter dans la maison, & ayant descendu le mort et la malade, les leur fait porter dans des brancards hors de la ville, dans les infirmeries, y fait aussi conduire toutes les personnes de cette maison, les accompagne lui-même avec des gardes, pour que personne ne s’en approche ; & il revient ensuite faire mûrer à chaux et à sable, la porte de cette maison.

« Le 11 on est averty que le nommée Boyal est tombé malade au même quartier ; on envoit des médecins et des chirurgiens les visiter ; ils déclarent qu’il est atteint du mal contagieux ; on fait à l’instant garder sa maison ; & la nuit venuë, Mr Moustiers s’y porte, fait venir les corbeaux des infirmeries ; & trouvant qu’il vient seulement d’expirer, fait prendre le cadavre, l’accompagne, le fait enterrer dans la chaux, & revient ensuite faire conduire le reste des personnes la maison;& en mûrer la porte ».

Voici ce qu’en disait Giraud:

« Le 11, on dit dans toute la ville qu’il y avoit déjà trois morts dans la rüe de Jean Galant. Tout le peuple en fut ému. L’allarme devenoit générale d’une heure à l’autre mais pour ramener la tranquillité on attribuait ces morts imprévües à des vers ou à de mauvais fruits. Comme l’on se persuade aisément de ce que l’on souhaitte, chacun travailla à dissiper les soupçon et à se rassurer dans l’espérance que la peste s’éteindroit dans les Infirmeries et que dans la ville, on en seroit quitte pour la peur.

Mr le gouverneur et Mrs les échevins jugèrent à propos d’informer la Cour de ce qui se passait. Pour cet effet, ils écrivirent au Conseil de marine, Monsieur le Maréchal de Villars, Gouverneur de Provence, et députèrent Mr Estelle, Premier échevin, et deux intendans de la santé, à Aix, pour en aviser Mr Lebret, Premier Président et Intendant de Justice et du Commerce.

Les autres intendans firent des perquisitions exactes dans la ville pour saisir quelques bours et quelques indiennes que les passagers de Chataud avoient porté dans la ville avec eux : pour mener dans les Infirmeries les personnes qui avoient communiqué avec les pestiférés. Cette recherche fut assez inutile. On fit sortir de ce jour là des Infirmeries toutes les femmes qui n’avoient eu aucune communication avec des personnes suspectes. On y arrêta Mre Gourdan, prêtre et aumonnier ordinaire. On en ferma exactement toutes les portes mais la peste étoit déjà dans la ville. Ainsi toutes ces précautions furent après coup ».

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