Aller au contenu principal
  • Les Prisons Du Palais de Justice Débordaient !

Les prisons du Palais de justice débordaient !

Submitted by webadmintsp@ma… on

Les pillages nocturnes étaient devenus tristement habituels depuis le « plus fort de la peste » et avaient en partie motivé la décision du roi de dépêcher six régiments d’infanterie à Marseille pour exécuter les ordres du commandant de la ville (Publication # 26). Les corbeaux et les garde-malades, qui de par leurs fonctions accédaient en tous lieux, comptaient quelquefois parmi les malfaiteurs. Ceux-ci opéraient dans les maisons dévastées par la maladie et la mort et n’hésitaient pas à se débarrasser d’éventuels témoins gênants dont ils abrégeaient l’existence pour perpétrer leur forfait. Ces comportements criminels furent réprimés avec la dernière sévérité non seulement parce qu’ils attentaient gravement à l’ordre public, et de la façon la plus indécente, mais parce que les vols d’objets et, notamment de hardes infectées et probablement infestées de puces, contribuaient toujours à répandre la peste.

Le commandant Langeron ajouta à la répression, un règlement de police propre à éloigner les voleurs. Il ne toléra plus que des inconnus vaguassent par la ville où bon leur semblait et, il obligea les passants de nuit à sortir éclairés par la lueur d’un flambeau, à partir de l’heure de la fermeture des portes de la ville, soit à 9 heures du soir. Tous les lieux de perdition, tels les cabarets et les « mauvais lieux » furent clos : cette fermeture, outre qu’elle dissuadait les sorties nocturnes, visait à éviter la licence des mœurs et donc à apaiser la colère d’un dieu vengeur courroucé par la débauche. Le guet veillait à la bonne exécution de ces mesures par des rondes régulières. Aussi vers les 22-23 novembre les prisons débordaient-elles de voleurs et de criminels qu’il fallait promptement juger. Langeron y pourvut en obligeant commissaires et juges survivants à revenir en poste. Enfin, tous ceux qui étaient en possession de clefs de maisons vides furent sommés d’en faire la déclaration et de les remettre aux autorités urbaines.

Le Dr Bertrand :

« On entroit sans façon dans celles où il ne restoit que quelque malade languissant, on enfonçoit les garde-robes, & on enlevoit ce qu'il y avoit de plus précieux, souvent on poussoit le crime & la scélératesse jusqu'à se délivrer de la vûë d'un témoin importun, qui n'avoit plus que quelques momens de vie, & ces énormes forfaits, beaucoup plus fréquens dans le fort du mal, que dans les derniers périodes, étoient souvent commis par ceux qui servoient les malades, par les Corbeaux, qui alloient enlever les morts, par ceux qui servoient dans les Hôpitaux, & qui par les déclarations qu'ils arrachoient des malades, étoient informés de l'état de ces maisons abandonnées, dont les malades eux-mêmes leur remettoient souvent les clefs : nous en avons déjà touché quelque chose ailleurs. Cette licence étoit encore plus grande à la campagne où l'éloignement des bastides, & la liberté de rouler & de fureter dans les ténèbres, favorisoient ces affreuses & criminelles expéditions. On peut juger que dans la suite ces hardes volées dans des maisons infectées, durent nous donner beaucoup de nouveaux malades, & contribuer à entretenir le mal.

« Des désordres aussi criants ne pouvoient pas long-tems durer sous un Commandant, dont la droiture & la fermeté tenoient toute la Ville en régie & en respect. Comme c'est à la faveur des ténèbres que les scélérats s'enhardissent à commettre leurs crimes, il fit une ordonnance qui défendoit aux gens inconnus d'aller par la Ville ; dès l'entrée de la nuit, & aux personnes connues, après la retraite sonnée, à 9 heures, & jusqu'à cette heure il leur étoit ordonné de ne sortir qu'à la lueur d'un flambeau. Il fit fermer les lieux publics, les cabarets, & surtout ces maisons de débauche si pernicieuses à l'innocence ; les patrouilles & les rondes se faisoient régulièrement, on fît par son ordre des recherches exactes & sévères dans la ville, & à la campagne. Les Prisons furent bien-tôt remplies de ces malfaiteurs, & de ces ouvriers d'iniquité ; l'on découvrit bien-tôt toutes les hardes volées & recelées tant à la ville qu'à la campagne ; on dénicha toutes ces sortes de femmes qui n'ont d'autre occupation que celle de corrompre la jeunesse, & l'on soutint ce bon ordre par de fréquentes exécutions qui réprimèrent la licence, & firent bien-tôt cesser ces crimes publics si capables d'enflammer toujours davantage le courroux du Ciel ».

Pichatty de Croissante :

« Les 22 & 23, les prisons se trouvant pleines de malfaiteurs, & les effets d’une infinité de maisons se trouvant exposés au pillage, par la mort de toutes personnes qui les habitoient, il [le commandant de Langeron] envoie des ordres dans le terroir pour obliger les commissaires de police de revenir, pour faire les procédures nécessaires, pour instruire le procès à ceux là & pourvoir à la seureté des effets des autres.

« Le 24, il rend avec M. le Marquis de Pilles et Mrs les échevins, une ordonnance à ma réquisition, qui enjoint à tous ceux qui se sont saisis des clefs des maisons, ou des effets des personnes décédées, ou qui les ont reçues en dépôt, en quoy qu’ils puissent consister, de venir dans les 24 heures en l’Hôtel-de-Ville, en faire déclaration par devant les commissaires de police, pour être pourvû à l’asseurance du tout.

« Le 25 une autre ordonnance pour la seureté et la santé publique, portant que pour empêcher les vols qui se font pendant la nuit, & qu’on augmente la Contagion, en transportant d’un endroit à l’autre des hardes pestiférées, ceux qui après la retraite sonnée seront surpris volant dans les maisons, ou transportant des hardes ou des meubles, seront punis de morts ; et que ceux qui seront trouvés avec des armes prohibées, seront condamnés aux galères ».

Date début