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Mgsr de Belsunce poursuivit injustement les Oratoriens de ses foudres

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Éduqué chez les Jésuites, Mgr de Belsunce s’opposait à la minorité de jansénistes de son diocèse, c’est-à-dire essentiellement aux Oratoriens, lesquels détenaient depuis 1625 le Collège municipal créé par délibération du corps de ville et fermé le 5 août 1720. Le très long affrontement théologique des Jansénistes et des Jésuites regardait la manière d’assurer le Salut, envisagé comme collectif. Sans la « grâce efficace », estimait le théologien Cornelius Jansen (†1638), l’homme ne pouvait préférer les volontés divines aux satisfactions humaines. Hélas, Dieu ne l’accordait pas à tous et Jansen rejoignait la théorie de la prédestination du protestant Calvin. Né protestant et converti au catholicisme avec toute sa famille, l’évêque de Marseille préférait la théorie du libre arbitre. Cette question n’était pas négligeable à une époque où le catholicisme était religion d’État et où quasiment tous les Marseillais étaient catholiques. Belsunce poursuivit les jansénistes de ses foudres son épiscopat durant. Il avait interdit aux oratoriens de prêcher et de confesser en 1718, après que ces derniers se furent opposés au pape à propos de la Bulle Unigenitus. Plus tard, il fit fermer le Collège des Oratoriens de La Ciotat.

La peste ayant éclaté, l‘évêque avait immédiatement reproché à ceux qui appelaient à un concile général d’avoir attiré la colère et la vengeance divines sur la cité pécheresse. Il les avait ensuite accusé de ne s’être pas mis au service des fidèles : les oratoriens se seraient enfermés dans leur couvent avant de s’enfuir. Le prélat leur reprochait de ne lui avoir pas demandé le droit de confesser les pestiférés, ce qu’il leur aurait aussitôt refusé. Il les condamnait pour n’avoir fait aucune aumône. Or, témoigne leur défenseur, « les Pères ne sont pas contentés de donner de la soupe à leur porte et de distribuer quelques pains, comme Monsieur de Marseille l’avance. M. Bonnefoy, qui depuis M. Mesnier a été commissaire du quartier, appris de tout le voisinage que ces Pères ont distribué le 11 aoust jusqu’au 12 septembre dernier, de la viande & du bouillon à tous les malades, et du pain, du vin & de la soupe à tous ceux qui étoient en santé ». Et ils accordaient aussi des secours pécuniaires. Msgr de Belsunce blâmait encore les oratoriens pour n’être pas allé rechercher un agonisant au milieu d’un amoncellement de morts afin de l’absoudre de ses péchés : ils pouvaient passer outre son interdiction puisque le malade se mourait. Pourtant, les Pères de l’Oratoire avaient donné l’eucharistie en leur église jusqu’à sa fermeture fin août, sur ordre des autorités, et avaient secouru les malades les plus gravement atteints par la maladie. En septembre, onze prêtres oratoriens, confrères et frères servants avaient succombé à la peste et quatre survivants avaient quitté la ville. Parti assister sa sœur dans une bastide, le Père Billon était mort aussi. Pis encore, le Père Jean-Jacques Gautier, supérieur du couvent, était accusé d’avoir propagé la peste dans le couvent par cupidité et non suite aux secours portés aux pestiférés : il aurait fait entrer des hardes (consistant en une chasuble brodée) héritées de Messire Estays, prêtre de l’Oratoire et chanoine des Accoules, mort de peste après avoir confessé l’épouse pestiférée du médecin Robert. Or, le Père Gautier, mort le 11 septembre 1720, avait bel et bien contracté la maladie en se portant au chevet des malades parvenus à l’article de la mort, les seuls auxquels l’Église, sinon l’évêque, autorisait les Oratoriens à administrer les derniers sacrements. Ni la seule malle et les monnaies dont il avait effectivement hérité n’étaient entrées au couvent.

Ces graves accusations, portées en pleine épidémie contre un Ordre religieux et une personnalité très appréciée des Marseillais qui l’avaient surnommée le « saint de Marseille », donnèrent lieu à plusieurs publications de diffusion nationale auxquelles le Père Giraud fait très longuement écho et ce, à deux reprises, rapportant les accusations de l’évêque et les arguments de la défense. L’évêque avait fait publier toutes ses lettres diffamatoires après qu’un « gentilhomme de Provence » eut pris la défense des religieux. Une « Défense des Oratoriens » fut encore publiée en 1721 ( https://books.google.fr/books?id=j5lhAAAAcAAJ&hl=fr ). Ce scandale entacha l’épiscopat de Msgr de Belsunce.

Le Père Giraud :

« (...)

« À l’exemple de M. de Mailly [cardinal], on auroit été tenté de demander à M. de Marseille les noms de ces communautés qui s’étant enfermées si à bonne heure, furent l’exemple de la lâcheté. On scait bien que les Mrs de Saint-Victor s’enfermèrent. Mais ils le firent avec conseil et par délibération de leur chapitre, en cela ils se conformèrent à leurs anciens usages et statuts pour un pareil cas où les seigneurs évêques de Marseille n’étoient ni ouïs ni consultés. Du reste, personne n’ignore qu’au commencement de la contagion quelques religieux se dévouèrent publiquement au service des pestiférés, que les maisons et églises de leurs communautés restèrent ouvertes pour confesser les malades dans leurs lits, les douteux et souvent même les malades qui venoient encore dans leurs églises, où ils donnèrent la communion sans aucune précaution jusques vers le 27 août, tems au quel elles furent presque toutes à la fois attaquées de la peste, forcées de se renfermer pour se rendre mutuellement des derniers offices de charité et de se garentir de l’infection des corps morts, que l’on portoit non seulement autour de leurs maisons, mais dans l’intérieur même de leurs églises, nonobstant les barrières des bans que l’on faisoit au milieu du corps de l’église. Alors on enferma presque généralement toutes les portes. Ceux qui n’étoient pas frappés de peste suffirent à peine pour secourir les malades et ensevelir les morts. Tous le mois d’août et celuy de septembre furent un tems de trouble, de désolation et d’horreur. Quelques personnes de communauté pouvant encore dans ces jours de confusion de se sauver de l’embrasement et du naufrage cherchèrent quelqu’azile, ceux des pères de l’Oratoire qui selon l’expression de Mr Moustier l’échevin ne pouvoient plus rester dans la ville, que sans aucun mérite pour eux et sans aucune utilité pour les autres, voyant toute leur maison infectée, se retirèrent à la campagne où ils avoient une retraite assurée. Y avoit-il un si grand mal en tout cela ? Mais M. de Marseille est aussi accoutumé à se satisfaire par écrit contre ceux mêmes qui ne l’attaquent pas et qui n’osent se défendre, que de pousser son animosité et sa vengeance à bout contre ceux dont il prétend quelques fois avoir été offensé. Capricieux ou intéressé, aussi faible ami que ceux de sa société dont il suit les maximes qu’il défend à outrance à tort et à travers, c’est un puissant et redoutable ennemi en paroles, en effets et par écrit. Lessus in marmore… « Lamentations dans le marbre… »

(...) »

Date début